La greffe entre Kasper Schmeichel et l'OGC Nice tarde à prendre. Au point que le gardien international danois pourrait quitter le club dès janvier.



Son entraîneur ayant décidé qu'il ne relèverait pas les gants au FC Slovacko (1-0, en Ligue Europa Conférence), Kasper Schmeichel, 36 ans le 5 novembre, les a enfilés du bout des doigts, pendant l'échauffement, jeudi soir. Mais il n'était pas question pour lui de prendre place dans la cage. Déjà qu'il s'échauffe très peu d'ordinaire, quand il est titulaire, il a préféré rester sur le côté. Là, où son entraîneur l'a placé. C'était sa manière à lui, de manifester son mécontentement. Cette scène n'est pas nouvelle. C'était la quatrième fois qu'il agissait ainsi. Comme le nombre de matches (sur quatorze possibles), pour lesquels Lucien Favre lui a préféré Marcin Bulka, son cadet de quatorze ans.

À 64 ans, l'entraîneur suisse a passé l'âge de se laisser dicter ses choix par sa direction. D'autant plus que l'arrivée de l'international danois (86 sélections) sur la Côte d'Azur le 3 août, pour trois ans, s'est faite dans son dos. Soucieux d'offrir un nouveau cadre de vie à sa famille après seize ans passés en Grande-Bretagne, Schmeichel a noué le contact via ses agents, dès cet hiver. La piste conduisant au Suisse Yann Sommer (33 ans) ayant fini dans une impasse, son nom est devenu une évidence pour Ineos, propriétaire de l'OGC Nice depuis 2019. Jim Ratcliffe, son PDG, est un grand fan de Manchester United, où Peter, le père de Kasper, demeure une légende.

Il a cherché à modifier certaines règles de vie collectives


Walter Benitez parti libre au PSV Eindhoven avant son arrivée, Favre préférait introniser Bulka comme gardien numéro 1. Ce qu'il fit d'ailleurs, en ouverture de la saison à Toulouse (1-1, le 7 août). Voyant qu'il ne débuterait pas, quatre jours à peine après son arrivée, Schmeichel aurait aussitôt téléphoné à la direction d'Ineos pour obtenir des explications.

Le décor était planté. Il n'a guère évolué, depuis. En manque de leaders dans son vestiaire hétéroclite, le Gym l'a recruté pour qu'il apporte son leadership. Lui, est venu pour jouer. Mais la greffe culturelle ne prend pas. À son arrivée, l'ancien capitaine emblématique de Leicester, avec lequel il a été champion d'Angleterre en 2016, a voulu imposer ses règles de vie. Il a cherché à en supprimer certaines. Comme de rendre les petits-déjeuners facultatifs. Le groupe a préféré les garder sous leur forme obligatoire.

Son profil ne colle pas au style de jeu de Favre

Schmeichel ne comprend également pas pourquoi les entraînements le sont. À Leicester, il a pris l'habitude de rester travailler en salle. Comme nombre de joueurs de son âge, il se gère et vit en autogestion. Si cela peut s'accepter, son mode de fonctionnement interroge, tout autant que sa silhouette et la décision d'avoir enrôlé un gardien doté de ce profil technique. Il ne colle pas avec le style de jeu prôné par Favre.

À Leicester, le Danois jouait dans une équipe évoluant avec un bloc bas, pour mieux procéder en contre. Ses qualités sur sa ligne faisaient alors merveille. À Nice, il découvre une équipe désireuse de se positionner plus haut, avec un jeu de possession. Cela l'oblige à couvrir l'espace laissé vacant entre lui et ses centraux. Notamment entre lui et Dante, dont la pointe de vitesse n'est plus la qualité première à bientôt 39 ans (le 18 octobre). Manquant d'explosivité, Schmeichel n'excelle pas dans ce rôle de « goal volant ».

Malgré l'aura du Danois, et son immense carrière, son recrutement prend de plus en plus la tournure d'une erreur de casting. À sa décharge, il quitte pour la première fois de sa carrière pro la Grande-Bretagne et doit s'acclimater à un nouveau championnat et une autre culture. Pendant que Favre se retrouve avec un dossier épineux à devoir gérer, Schmeichel vit mal de se voir contesté.

Il ne compte guère de relais dans le vestiaire

Il trimballe sa statue du Commandeur comme dans un mauvais film. Ou plutôt, dans un scénario où il n'y a pas de premier rôle écrit pour lui. Incapable de crever l'écran, le Danois, qui entretient des relations tout au plus professionnelles avec Bulka, ne compte guère de relais dans un vestiaire où Dante continue d'exercer son capitanat et Mario Lemina, d'imprimer son aura. Hormis, peut-être, auprès de la colonie britannique (Barkley, Bryan, Ramsey), au poids pour l'instant limité.

Cette situation apparaît intenable, à terme. La manière dont Schmeichel vient aux repas, la tête enfouie sous une capuche, sans toucher aux plats, tend à le confirmer. Là sans être là, le vice-capitaine des Danois évolue dans son monde. Celui des Aiglons n'étant visiblement pas le sien, son départ, dès janvier, n'est pas à écarter.