Le conseil de surveillance de l’OGC Nice devrait entériner, ce soir, le remplacement de Jean-Pierre Rivère par Gauthier Ganaye à la présidence du club. C’est la fin d’une époque, entamée en 2011.


Ce changement de président était-il prévu ?


En fin de saison dernière, des différends étaient apparus entre les associés sur la stratégie à adopter en matière de recrutement. Rivère et Fournier disent avoir dû batailler pour imposer la prolongation de contrat de Dante (jusqu’en 2021) ou l’arrivée de Youcef Atal, par exemple. Plus récemment, les actionnaires ont bloqué les arrivées, quasiment conclues par Fournier, de deux joueurs importants : Ryad Boudebouz et Facundo Ferreyra. Dans le camp d’en face, Paul Conway, collaborateur de Chien Lee dont il a l’oreille, regrettait récemment que le club achète des joueurs de plus en plus chers, en référence au recrutement de Danilo et Myziane Maolida (10 M€, chacun), jusque-là décevants. Ce n’était plus possible.


« Dès l’été dernier, notre départ était acté, nous a confié Rivère, hier. Quand on a pris Patrick Vieira, on lui a dit qu’on avait des difficultés avec nos associés. Ce n’est pas un coup de tête. Quand il y a trop de contradictions, il vaut mieux laisser la place. Il ne servait à rien qu’on fasse ce mercato d’hiver .» Le 11 janvier, le binôme, qui avait prévu de partir au plus tard le 31 mai, a donc annoncé son départ, alors que les actionnaires l’attendaient pour mars. Rivère sera remplacé par Gauthier Ganaye, lequel devrait également occuper les fonctions de directeur général.


Jeudi matin, Rivère et Fournier, qui incarnaient le club depuis 2011, ne seront plus là. Actionnaires de la SASP (société anonyme sportive professionnelle) à hauteur de 20 %, les deux hommes ont acté la vente de leurs parts et le paiement échelonné de leurs actions est entériné. Ils disent l’un comme l’autre n’avoir aucune amertume et plein de projets : Fournier devrait rester dans le milieu du foot, Rivère le quitter.

 


Un changement d’actionnaire reste-t-il possible ?


Au cours des derniers mois, Rivère avait proposé aux actionnaires de chercher de nouveaux investisseurs et ils avaient accepté. Il dit aujourd’hui en avoir un sous la main, prêt à entrer dans la phase 2 de son engagement, la lettre d’intention d’achat (LOI, dans le monde de l’entreprise), et en avoir averti Chien Lee. Il devrait être question de cette offre de reprise durant le conseil de surveillance.


L’OGC Nice serait aujourd’hui estimé entre 90 et 100 M€ et l’offre dont disposerait Rivère pourrait permettre aux actionnaires qui l’ont rejoint en 2016 de revendre leurs parts plus de deux fois le prix qu’ils les avaient achetées, à cette époque. Si c’est vrai – ce dont Paul Conway a publiquement douté dans Nice-Matin, provoquant la colère de Rivère –, pourquoi les actionnaires sino-américains, qui se disent des gens de Wall Street, négligeraient de passer à côté d’une telle plus-value ? Parce qu’ils se sentent capables, à moyen terme, de faire fois cinq ou fois dix, plutôt que fois deux, en dirigeant le club ? Parce que Chien Lee est très gourmand ? « Parce que certains veulent prendre la lumière », considère Jean-Pierre Rivère, visant sans doute Conway, faible actionnaire mais fort communicant.

 

 


« Lui, il parle, mais moi j’ai des documents, signés par le conseil de surveillance et par des repreneurs intéressés », ajoute Rivère. Dans cette querelle d’actionnaires qui se traitent de menteurs, Gauthier Ganaye a pris de la distance. Jeudi matin, il sera président, il a prévu de rencontrer les salariés du club et de faire le tour des institutions locales, dans les plus brefs délais, afin d’expliquer le projet qu’il défendra. Jusqu’ici, ses premiers échos, comme les premiers signes lancés à travers un mercato figé, n’ont pas fait un triomphe auprès des supporters.ogcn.info


Le seul à ressortir grandi de tout cela, c’est Patrick Vieira, droit comme un I et dont le nom est scandé à chaque match par le public de l’Allianz : Fournier et Rivère ne sont pas fiers de l’avoir planté plus tôt que prévu et ses successeurs ne devraient pas lui offrir les deux recrues d’envergure qu’il souhaite pour mener le Gym dans le top 5. Malgré cela, son équipe est 7e de L 1.


Quelle stratégie va développer Ganaye ?


En accord avec les actionnaires, Ganaye veut revenir à ce que faisait Nice il y a trois ans : miser sur des joueurs à fort potentiel. En un mot, du trading, avec ses bonnes et ses mauvaises passes, ses piles et ses faces, comme à Wall Street et à Monaco. Plus question d’investir sur des joueurs à des salaires exorbitants tels que ceux de Dante, Mario Balotelli ou Wesley Sneijder, raison pour laquelle le dossier Valère Germain a récemment été éconduit par les actionnaires, alors que l’OM aurait pris en charge 57 % de son salaire dans le cadre d’un prêt.


Ganaye, qui souhaite mettre l’accent sur le développement commercial et marketing du club, ne veut pas perdre de temps et tourner autour du pot pour annoncer son projet à l’environnement niçois et aux supporters. Et pour leur dire que le projet qu’il porte n’est pas dangereux. Ils ne seront pas faciles à convaincre et Vieira, qu’il n’a pas souhaité contacter tant qu’il n’était pas nommé, non plus.


L’idée que le Gym va baisser la voilure et la jouer serrée est dans tous les esprits, et tant que Rivère prétendra avoir sous le coude une offre de rachat, sonnante, trébuchante et alléchante, son ombre planera sur le club, et celle de son retour aussi. Des doutes et des inquiétudes, il y en aura, mais au moins, cette fois, actionnaires et managers tireront dans le même sens. C’est déjà ça, et maintenant, à Ganaye de jouer.