Indésirable à Liverpool, l’attaquant italien a été annoncé partout en Europe pendant le mercato. Mais son instabilité légendaire est un frein à l’embauche



Sur le terrain, il est un des footballeurs les plus talentueux de sa génération mais l’un des plus inconstants aussi. En dehors, il peut faire acte d’une folie incompréhensible comme d’une générosité désarmante. Partout, il flirte tour à tour avec la grande classe et le ridicule. Comme le personnage de jeux vidéo qui lui donne son surnom, «Super Mario» Balotelli peut être tout petit, ou très grand. Sur console, c’est très simple: le plombier à moustache attrape un champignon et passe d’un état à l’autre. Dans la vraie vie, tout est beaucoup plus compliqué.

 



A quelques heures de la clôture du mercato d’été, ce mercredi à minuit, l’attaquant italien ne savait toujours pas où il évoluera cette saison. Prêté par Liverpool, il sort d’une saison très mitigée avec l’AC Milan (23 matches, 3 buts), qui n’a pas souhaité le conserver. De retour outre-Manche sur les bords de la Mersey, l’entraîneur Jürgen Klopp lui a clairement fait savoir qu’il ne comptait plus sur lui. Mardi après-midi, les médias britanniques et français le disaient sur le point de trouver de l’embauche à Nice, dans l’équipe de l’entraîneur vaudois Lucien Favre. Quel que soit son dénouement, le feuilleton aura été le plus rocambolesque de l’été.


Une réputation comme boulet



Les nombreux sites web qui auscultent les mouvements sur le marché des transferts en temps réel l’ont annoncé un peu partout en Europe. Ils ont relevé des contacts ou un intérêt à Nantes, à Bordeaux, à la Sampdoria, à l’Ajax Amsterdam ou – liste non exhaustive – au Besiktas Istanbul. Le nom de Balotelli était évoqué, puis écarté. En Italie, le club de Palerme, ville où l’attaquant est né, a bien manifesté son intérêt à l’enrôler; comme le FC Sion en Suisse. Mais le talent de colporteur de Mino Raiola – l’agent que Balotelli partage avec Paul Pogba et Zlatan Ibrahimovic notamment – s’est longtemps révélé inutile pour placer un joueur trop difficile à gérer aux yeux des uns, trop cher pour les autres (son salaire avoisinerait les 6 millions de francs annuels à Liverpool). Et au-delà de sa véritable personnalité et de ses prétentions financières, c’est bien sa réputation que Mario Balotelli trimballe comme un boulet.



Il est au football ce que Chuck Norris est au cinéma: un homme de chair et d’os dépassé par sa propre légende. A une différence près: si les «Chuck Norris facts» sont des jeux de l’esprit, les frasques du footballeur italien, compilées partout sur Internet, sont bien réelles. Elles dépeignent un personnage aux mille et une facettes: indéfendable lorsqu’il s’amuse à balancer des fléchettes depuis sa fenêtre en visant des jeunes joueurs de Manchester City; immature quand il provoque un incendie chez lui en allumant un feu d’artifice; touchant lorsqu’il offre mille livres sterling à un sans-abri après avoir gagné au casino; d’une empathie insoupçonnable quand il accompagne à son école un enfant victime de harcèlement scolaire et joue les médiateurs.


Presque de quoi faire oublier que Balotelli est un joueur de football avec de belles références. Il débute en Serie C italienne à 15 ans, puis en Serie A à peine majeur. Impressionnant physiquement, doué techniquement, son potentiel en fait très tôt une star. En 2012, il marque l’Euro de son empreinte en signant, contre l’Allemagne, un doublé qui envoie l’Italie en finale. Un peu plus tard, il marque 30 buts en 54 matches sur une saison et demie avec l’AC Milan, jusqu’à l’été 2014. Ballon d'or?

Mais tout cela date un peu. Depuis deux saisons, Mario Balotelli n’est plus vraiment lui-même. Ni aussi fort sur le terrain, ni aussi fou en dehors. Comme ses plus beaux buts, ses frasques les plus mythiques appartiennent au passé, même s’il n’a que 26 ans. Mais des deux, c’est la mauvaise réputation qui colle le plus à la peau. «Je n’ai pas une opinion de lui favorable», avouait dernièrement Senol Günes, entraîneur du Besiktas. «Il n’a pas joué depuis je ne sais pas combien de temps. Je n’ai pas vu d’images de lui à la télé depuis des années», remarquait Lucien Favre lorsqu’une première rumeur envoyait le fantasque Italien dans son équipe.

Le club niçois saurait-il relancer Mario Balotelli comme Hatem Ben Arfa, enfant terrible du football français, avant lui? Le principal intéressé ne doute en tous les cas pas de sa capacité à rebondir, comme il l’expliquait cet été après avoir été laissé sur le carreau par l’équipe d’Italie. «Je deviendrai Ballon d'or, affirmait-il. Je sais, cela fait rire. Il est possible que je n’aie pas fait tout ce qu’il fallait pour être le plus fort, mais l’important c’est que j’ai compris tout cela et qu’il n’est pas trop tard.»