Le Gym est au bord du gouffre. Le tableau est sombre, très sombre. Ce club ne nous fait plus rire, comme il la longtemps fait, il nous fait pleurer.

 

Nice construit un stade. Nice est la capitale de la Côte d'Azur. Nice c'est sea sex and sun, une image en or massif. La capitale mondiale du soleil et... des magouilles, de la médiocrité érigée en art de gouverner. Parce que Nice, il y a un siècle et demi, n'était encore qu'un gros bourg de paysans et de pêcheurs, qui vivait de l'anchois et de la salade. Et le bourrin niçois ne s'est pas mué en pur-sang en un claquement de doigts. Image trompeuse, réalité honteuse.

 

 

 

 

Les maires ? Des avocaillons de province, un fils à Papa devenu bandit et un "bébé Médecin" champion de moto. Et j'en aurais autant pour l'opposition municipale gangrénée par le choc des égos. Le constat est affligeant. Un tissu économique tertiaire, des transports, des femmes de chambre et des serveurs, une université qui fait rire la France entière ; une ville entre les mains du lobby des hôteliers, des commerçants et de l'immobilier qui en ont fait, pour le plus grand malheur des Niçois, un des endroits les plus chers de la planète. Une identité culturelle fossilisée, qui n'a pas résisté au choc de la mondialisation, en partie (en partie seulement, ouf !) confisquée par une bande de nazillons locaux. Le sport ? Ca oui, on en a des clubs, mais de là à être performant... Même les nageurs du water-polo niçois ne font plus peur à personne. Quand au Gym, fils aîné de la mairie, il est incapable de se développer par lui-même depuis que les financements municipaux ne peuvent plus couvrir les frais de l'équipe professionnelle, et de Stellardo à Rivère en passant par Sensi, c'est bien l'ombre portée de la municipalité ou de l'affairisme immobilier qui se dessine sur le blason d'un Gym étouffé par tant de sollicitude.

 

 

Le Gym, symbole, victime du syndrome de la médiocrité nissarde ; incarnation moribonde de la médiocrité nissarde à lui tout seul. Le dernier qui y a parlé à raison, pour peu qu'il parle très fort, et surtout qu'il soit de Nice-canal-historique, canal-Nice-Est de préférence (Pasteur ou Saint Roch, on a l'esprit tellement ouvert à Nice !). Nous sommes "entre Niçois", comme disait Roger Ricort. C'est bien ça qui est inquiétant ! L'illusionniste Rivère est arrivé dans les bagages du Motodidacte, avec sa carte de l'UMP en guise de passeport et de pédigrée d'excellence. Un Immobilierodidacte en somme. Avec ses 12 millions pour éponger les errements de la "gestion" des Niçois qui s'ingéniaient, avant lui, à gérer à court terme, et sans lesquels, il est vrai, le club serait en faillite, tant le mal est profond. 12 millions, c'est bien pour tenir deux ans. Parce que dans deux ans.... Le stade, les Qataris, une belle plus-value en perspective (tiens, tiens, on en connait qui ne voulaient plus gérer le club, mais qui, pourtant, ont gardé leurs parts), bref, esbroufe et poudre aux yeux.

 

Le problème est, bien évidemment de survivre pendant ces deux ans. Enfin, ça, c'est ce qu'on disait il y a trois mois. Aujourd'hui l'urgence est encore plus nette. Comment survivre cette année ? Comment survivre en L1 quand on sait bien par ailleurs que la L2 signifierait la mort subite du club. Les choses, pourtant, sont claires et la politique limpide. On ne change pas une équipe qui perd. On maintient en poste un secteur sportif totalement discrédité depuis deux ans. Pire que ça, lorsque l'on se décide à changer quelque chose, on privilégie "le changement dans la continuité" qui est au changement ce que le centrisme est à la révolution ou Goebbels à la liberté d'expression. Après tout, pourquoi s'affoler lorsque l'on est 17ème au classement ?

 

Mais ces maux, nous ne les découvrons pas d'aujourd'hui. Car le Gym, lui, alors qu'il doit se structurer - tout en payant des "Niçois" grassement à "développer le club" depuis 10 ans pour au final passer une couche de peinture dans le vestiaire - ne compte en fait que sur l'argent du contribuable pour avancer, faisant de la construction du stade par ledit contribuable l'alpha et l'oméga de son "développement". Comme au bon vieux temps des années cinquante ou le maire allongeait les sous pour que l'OGCN gagne des titres. Mais les temps ont changé, tout le monde l'a compris, sauf au Gym, où l'on frise l'escroquerie, la gabegie, l'emploi fictif, où l'on s'enorgueillit de ne posséder ni diplôme, ni compétence, ni expérience pour exercer, où l'incantation tient lieu de politique générale, les mauvais choix, de cap stratégique.

 

Ce qui est nouveau; aujourd'hui, c’est l'absence de réaction de la bête blessée. Comme une sorte de résignation à voir mourir le Gym, à le voir dépérir lentement et sûrement. Contre Saint-Etienne, il était frappant de constater l'apathie de tous. Public, supporters, dirigeants, staff technique. Seuls et bien seuls, dix, puis neuf joueurs essayaient encore d'y croire en courant dans tous les sens. Même Renato, serial gaffeur au grand cœur, pouvait sortir la tête haute. Mais autour du rectangle vert, c'était Waterloo ; une défaite au cœur de la défaite, le désastre au carré. Le staff ? Muet, gentil, poli. Il est tellement naturel à Nice de se faire massacrer par l'arbitrage. Et puisque, sur le terrain, on donne si gentiment le bâton pour se faire battre, acceptons les châtiments, tous les châtiments, aussi injustes soient-ils. Pourquoi s'échiner encore à dénoncer l'arbitrage à deux vitesse, la conduite scandaleuse d'équipes qui se comportent au Ray comme des voyous parce qu'ils savent que la police joue dans leur camp. M. Rivère est par ailleurs très confiant. Tout va mal. Mais tout va bien, puisque, de toute manière, on prend les mêmes, on applique les mêmes politiques en attendant que la bête meure sous les yeux désabusés et dépités d'un stade du Ray vide, triste et froid. Où sont passés les supporters ? Ils ont compris depuis longtemps qu'ils n'y avait plus grand chose à attendre ou a espérer. Alors ils ne viennent plus. Parce qu'il n'y a plus grand chose à faire ou à voir dans ce Ray où seule une poignée de nostalgiques partage encore son dégoût et sa désillusion, résolue à ne rien rater de l'agonie.

 

Alors oui, cette fois-ci, alors que je me suis toujours dit que "", je commence à me dire que la bête niçoise est mortelle elle aussi, et qu'à y regarder de plus près, on est tout simplement en train de la faire crever. Qui sont ces mystérieux assassins ? Le complot arbitro-judéo-maçonnico-jacobin ? Non. Nous, tous autant que nous sommes. nous, les Niçois, supporters et électeurs complaisants qui s'accommodent de tant de médiocrité à tous les niveaux, de la mairie à Charles Ehrmann, nous qui, des tribunes au banc de touche, en passant par la loge présidentielle ou la salle de presse, n'avons même plus la force et la foi de donner ce dernier coup de serre de la bête blessée. Parce que la bête que l'on assassine et qui se résigne à la mort, c'est Nous.

 

Silence, on meurt !