Le capitaine de Nice décortique le rôle de leader qu’il a occupé ces derniers jours, alors que son club joue son avenir européen ce soir à Lyon.


NICE – Le défenseur et leader brésilien de Nice s’est multiplié sur le terrain des obligations médiatiques, jeudi, sans jamais ranger son sourire vitaminé. Juste après sa conférence de presse, il a accordé un supplément à L’Équipe, pour s’arrêter sur son rôle en cette semaine déterminante. Dans le vestiaire azuréen, la parole du capitaine a du poids et on a voulu la soupeser avant le match décisif pour l’Europe qui attend Nice à Lyon.

 

« Que faites-vous de plus que d’habitude durant les jours qui précèdent une rencontre aussi importante que ce déplacement à Lyon ?

 

Un leader ne doit pas programmer les choses, il doit savoir ce dont ses coéquipiers ont besoin. Si tu trouves que l’équipe est un peu moins concentrée, tu le lui fais savoir. Si tu sens en revanche que tout le monde est prêt à aller à la guerre, tu les laisses tranquilles. Et tu es positif : on va réussir, on va le faire.

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Faut-il prendre la température ?

 

Exactement. Ça ne sert à rien de remonter tes coéquipiers s’ils le sont déjà. Il faut savoir que parfois tu dis des choses en parlant, mais que tu dis aussi des choses en te taisant.

 

Avez-vous un exemple concret ?

 

Prenez ce qui s’est passé cette saison. On a vécu deux à trois semaines difficiles, pendant lesquelles on a perdu plusieurs matches de suite (six, du 1 er octobre au 2 novembre). Je parlais tout le temps, tout le temps. Alors à un moment donné tout le monde attendait que je cause, mais je ne l’ai pas fait. C’est un signal, ça veut dire que quelque chose ne va pas. C’est de la psychologie. Être leader, ça ne signifie pas que je suis fort, ceci, cela. Il faut simplement être intelligent, pour jouer làdessus. Alors, comment est la température, en ce moment ? Elle est bonne ! La saison passée, on ne jouait plus rien lors de la dernière journée (3-3... à Lyon) et on était tranquilles. En revanche, hier (mercredi à l’entraînement) il y a eu du jeu, de la compétition, les gars voulaient tous gagner, il y avait des duels. C’est très encourageant. Comme il y a un bon état d’esprit cette semaine, je les remonte encore plus. Pour leur montrer que rien n’est suffisant. Les joueurs qui sont avec moi(lors des oppositions), je leur dis d’y aller, d’agresser chaque fois. Et moi, dans les duels je montre que je suis là (il tape sèchement une main avec l’autre). Car si la température est bonne, celle qui nous attendra à Lyon sera bien différente, on devra donc hausser notre intensité de jeu. C’est ce qui nous a manqué lors de certains matches cette saison,notamment quand on a mené au score. Et c’est dommage.

 

Donc, à l’entraînement il faut y aller, montrer?

 

Oui, tout en faisant attention à ne blesser personne. Mais il faut y aller comme si c’était un vrai match. Et dès qu’on sent qu’il y en a un ou deux qui n’ont pas encore compris, on les bouge un peu plus. On les met dans le bain.

 

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“Balotelli ? Ce n’est pas moi qui lui ai permis d’être bon. (...) Simplement, il y a des moments où je l’ai senti fatigué, déçu. Je l’ai secoué, dans ces cas-là. Il est venu à la maison, on a beaucoup parlé.

 

Vous parlez de l’attitude, venons-en aux mots : allez-vous avoir, d’ici au match, des phrases particulières pour certains joueurs ?

 

Déjà, il n’y a pas que Dante dans le groupe : il y a Jean-Michaël Seri, Wylan Cyprien, Alassane Plea, Mario Balotelli... Après, moi de toute façon, je discute un peu à gauche à droite, pour que certains joueurs soient conscients des choses. Et quand je parle avant un match, les mots viennent tout seuls.

 

Ne réfléchissez-vous pas avant à ce que vous allez dire ?

 

Non. C’est chaque fois un sujet différent. Avant Caen (4-1, le 12 mai), notre dernier match à domicile de la saison, j’ai dit qu’il fallait apporter du plaisir à nos supporters et se maintenir dans la course à l’Europe.

 

Cette fois-ci, aurez-vous un discours particulier pour les joueurs sur le départ, comme Balotelli ou Seri ?

 

Avant un match pareil il ne faut pas laisser de petites choses nous bouffer un peu de concentration, avec qui s’en va ou qui reste. S’il y a trop de bruit par rapport à ça, je leur dis : “Ça ne nous intéresse pas.” Je leur demande de mettre ces choses-là de côté. Mais s’ils n’y arrivent pas tu leur adresses un message pour qu’ils s’en servent comme d’une motivation : “Je vais partir, mais je vais tout donner.” C’est gagnant-gagnant. Mais l’important c’est le club, qui est plus grand que tout le monde. Si Mario part, d’autres vont arriver, l’essentiel est de se préparer pour lematch.

 

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Quel a été votre rôle auprès de Mario Balotelli durant ces deux ans ?

 

Déjà, s’il a réussi ici c’est parce que Nice l’a mis dans de très bonnes conditions. On a très bien compris son fonctionnement et on a été très flexibles avec lui. J’ai eu plusieurs phases avec lui. Je voulais vraiment l’aider. À la fin, c’est un bon gars. Tu cherches à le comprendre. Ce n’est pas moi qui lui ai permis d’être bon, de marquer tous ces buts, c’est lui. Simplement, il y a des moments où je l’ai senti fatigué, déçu. Je l’ai secoué, dans ces cas-là. Il est venu à la maison, on a beaucoup parlé. J’ai pu lui faire passer des messages qu’il a compris, qu’il a pris de façon positive.

 

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Dans quelle langue échangez-vous, tous les deux ?

 

Je parle couramment italien. On discutait en anglais aussi. Et il comprend très bien l’espagnol : on utilisait cette langue dès qu’il nous manquait un mot.

 

Mais vous n’avez pas joué en Espagne !

 

Non, mais c’est un peu cousin avec le portugais. En plus, en Amérique du Sud il n’y a que les Brésiliens qui ne parlent pas espagnol. Et puis j’ai eu beaucoup d’amis argentins, vénézuéliens. À force de parler, tu commences à apprendre.

 

Vous parlez aussi français, allemand...

 

Je connais beaucoup de cultures, j’arrive donc à comprendre les uns et les autres, leurs erreurs. C’est pour ça que j’arrivais à trouver les mots avec Mario, parfois. Quand tu pratiques plusieurs langues, tu es plus ouvert. Surtout pour en apprendre d’autres.

 

Avez-vous des projets ?

 

Le russe. Ia gavariou parouski (‘‘Je parle russe’’). Kharacho ! (‘‘ Bien’’). Le chinois, aussi. (Il sourit.) C’est la langue du futur ! » ‘

 

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En bref


34 ANS (BRE) 1,88 m ; 85 kg. Défenseur central. Club : Nice. 13 sélections.

 

2013 : cette année-là, il remporte notamment la Ligue des champions et la Coupe du monde des clubs avec le Bayern Munich, ainsi que la Coupe des Confédérations avec la sélection brésilienne, où il débute le 6 février 2013, face à l’Angleterre (1-2).

 

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Le nombre de jours entre son dernier match de Ligue 1 avec Lille, le 3 décembre 2005, et son premier avec Nice, le 11 septembre 2016.