Près de 9 mois depuis la pénible soirée de Monaco et depuis beaucoup de brimades et de mesures ont frappé les ultras niçois.

 

 Et puis, le 17 octobre, Saint Etienne est passé, auréolé d’une place de leader de nature à ranimer les passions, celles la même qui, parfois, mal canalisées ont conduit notamment à la dissolution d’un des plus anciens groupes Ultra, ma deuxième famille. 

 

Pour l’instant, le Ray garde son âme, mais elle erre tristement. La pluie était de la partie, refroidissant les ardeurs.

 

Il m’a semblé que le public niçois reste imprévisible, même si ce dimanche, il s’est montré sage.

 

Tombé l’ennemi juré aura apporté de la joie dans les tribunes et permis à nombre d’entre nous de faire parler notre esprit railleur, gouailleur, moqueur… nissart !

 

Vers 19 h, le Gym a donc mis fin à une longue invincibilité des verts, avec plus de courage que de brio (si ce n’est le but de Mounier).

 

En revanche, le stade reste triste et il faudrait un sacré parcours pour le ranimer, d’autant que désormais il est quasiment tout interdit dans un stade de foot.

 

Une chose est certaine, le foot business progresse et sans masque.

 

Le foot est une vaste entreprise où rentabilité, juste prix, consommation, marchandise, libre circulation, marques sont devenus les nouveaux mots du vocabulaire ambiant.

 

Les médias, flanqués de journalistes approximatifs et douteux, font la pluie et le beau temps.

 

Bientôt ce sera la fête à noeu noeu. Les méchants auront été chassés et ce pourquoi nous avons vécu aura définitivement été enterré.

 

Les excès des uns sont désormais remplacés par ceux des autres, sauf que ces derniers ont le pouvoir, l’argent et le bâton.

 

Et ces financiers sans passion, alliés de circonstance avec la bien-pensance se désintéressent de ce qui a fait notre univers pendant des dizaines d’années.

 

Ainsi, ma tribune est un petit aperçu de l’univers carcéral, avec fouilles, interdits, photographies, caméras, infiltrés.

 

Billy prend des photos. Jojo agite sa matraque. Robert menace. Bertrand vérifie les identités. Paul t’empêche de sortir quand tu le veux. Bernard te regarde inquiet quand tu vas pisser. Gérard note les chants envoyés ; les écharpes sont détricotées, les slips étudiés, les ceintures débouclées, jusqu’aux briquets remisés.

 

Bref, ce n’est plus une tribune, mais une cage avec ses gardiens zélés.

 

Le principe de précaution, la peur de tout, de celui qu’on catalogue sans le connaître, sont passés.

 

Et pourtant… ça vibre encore.

 

Et pourtant ça chante encore les 3 lettres magiques.

 

Et ça recasse tous les souvenirs passés, les déplacements épiques, les soirées enfumées…

 

Finalement, nous ne sommes pas dissolubles et quoi qu’ils fassent, quoi qu’ils pensent, nous en serons toujours, elle sera toujours notre île, notre catalyseur, notre étoile, celle dont jusqu’au nom il faudrait oublier.

 

La répression n’a jamais tué. La RDA a vécu, le mur est tombé. La liberté ne meurt jamais.

 

Comme la mauvaise herbe, l’envie de vivre selon notre passion repousse.

 

Mais pour combien de temps ?

 

J’ai les glandes et je sens bien qu’une époque est révolue, que la page va se tourner inéluctablement.

 

Que restera-t-il ? Comment les stades de foot vivront dans dix ans ?

 

Pour vivre, il nous faudra certainement réinventer, tout réinventer, mais en gardant cette philosophie qui a guidé des générations de supporters : être Ultra, c’est voir le foot différemment et pas uniquement pour ce qu’il est (un sport), mais pour ce qu’il nous a donné envie de créer.

 

A travers cette chronique, j’essaierai de vous expliquer ce qu’était notre vie en populaire… et de réfléchir à ce qu’elle pourrait devenir à l’heure du foot business.

 

Peut-être cela nous aidera-t-il à entrevoir le futur.

 

Pour l’heure, l’autre soir, on plaisantait (tout en étant au plus profond de nous très sérieux) : le jour où les bulldozers viendront t’envoyer par le fond, nous serons là à réclamer notre petit bout de tribune, de gradin, un morceau de nôtre populaire, de nous et de notre vie !

 

Un anonyme, parce que Billy veille…